Femme mariée, femme sans nom
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Femme mariée, femme sans nom

Femmes


L
  Femmes
e combat des femmes est il ringard à l'aube de ce siècle? Le débat sur la parité de la représentation féminine dans la vie politique prouve que non. Parlons d'autres petits 'soucis' féminins...
18/10/1997

L
  De la fin des gynécos
a gynécologie médicale n'est plus enseignée depuis 1986. Bientôt, les femmes ne pourront parler et prévenir leurs maladies spécifiques qu'avec leur médecin familial ou l'hôpital.
06/10/1999
P
  Gynécologie médicale : la pétition
our demander que la gynécologie médicale existe encore dans 20 ans, vous pouvez signer la pétition en ligne.
08/10/1999
D
  Femme mariée, femme sans nom
e nombreuses femmes perdent leur nom et jusqu'à leur prénom en se mariant. Un anachronisme qui se vérifie dans les "avis mortuaires" et qui est ici dénoncé.
08/09/1996
D
  Sages? Heureuses? non, oubliées !
ans toute ZUP il y a des femmes, donc des filles, des jeunes filles et des petites filles trop souvent oubliées lorsque le mal des banlieues est analysé.
09/09/1996

"Muriel tu m’feras un texte pour mes pages Internet ?"
La demande est pressante.
. "Oui, oui" réponds-je évasivement. "Mais sur quoi ?"
Je me creuse la tête. Pas vraiment le temps d’écrire ... Trouver le sujet, le rédiger. Ca prend un minimum de réflexion. Et du temps, je n’en ai pas beaucoup. Il devient plus rare et de plus en plus précieux.
. "Muriel, alors ? Ton texte ?" (le ton est de plus en plus insistant)
Je n’aurai pas dû accepter ... Je l’avais fait du bout des lèvres pour faire plaisir et pour être tranquille, en misant sur le temps (toujours lui) et l’oubli qui l’accompagne.
Je ne suis pas chroniqueuse, ni journaliste ! Quelques jours passent.

Enfin ! J’ai une idée lumineuse !
Pourquoi ne pas parler de ce qui m’agace chaque matin ? Et qui me fait invariablement entrer dans une rage folle pendant mon petit déjeuner ?
Non, ce n’est pas ma confiture de mirabelle que j’ai ratée l’an dernier et qui coule entre mes doigts, ni les poils de Pamplemousse, notre chatte, qui sont collés à ma petite cuillère ou qui surnagent dans mon café au lait (malgré l’interdiction, la chipie profite de la nuit pour grimper partout), ni Mina qui se réveille et qui m’appelle au moment où je m’apprête à griller ma première cigarette ...
Non rien de tout cela.
Vous donnez votre langue au chat ?

Et bien, j’ai l’habitude chaque matin d’ouvrir le journal que le porteur a si gentiment glissé dans la boite aux lettres. Ca me prend en tout et pour tout disons ... 5 bonnes minutes. Un coup d’oeil sur Talange et ses nouvelles, un autre sur la météo. Enfin je m’attarde, non pas sur mon horoscope, mais sur les avis mortuaires.
Drôle de manie, me direz-vous !
Je me plonge doucement parmi les encadrés noirs. Je cherche d’abord rapidement un nom connu. Rien. Tant mieux. Puis je décrypte les annonces et je me les commente silencieusement. Les villes, la parenté, les âges ... 86 . 92 . 96 ... Je n’ai pas de compassion. Ils ont eu le temps de vivre. C’est normal de s’éteindre à ces âges ... 32 . 36 . 40 ... Je soupire. Je me sens concernée. C’est ma tranche et là, c’est inacceptable! Trops tôt pour mourir.
Que me révèlent encore ces encadrés accolés conscencieusement les uns aux autres ?
Il est marié, divorcé ou veuf (attention cette dernière mention concerne uniquement les femmes). Il a une famille importante ou réduite, disséminée aux 4 coins de la France, ou attachée à la région. Il a une profession, des titres, peut-être une religion. Il est décédé par accident (mort tragiquement), par maladie (suite à une longue et douloureuse maladie), ou par suicide (à son heure et quand il lui a plu ...). L’importance de ses relations sociales et professionnelles se devine par le nombre d’avis de décès. Chaque formule est différente et riche de sous-entendus.

Les avis mortuaires sont une véritable matière pour une étude sociologique sur nos moeurs et nos usages.
Avis mortuaireMon esprit vagabonde ainsi à travers les vies qui viennent de s’arréter. Et puis voilà, mon regard accroche un nom. Je m’enflamme, je m’énerve, j’enrage.
Il a plu à Dieu de rappeler à lui
  • Mme AUGUSTE BOMPARD
  • née Jeanne Bastien

Mme AUGUSTE BOMPARD : quel drôle de nom pour une femme n’est-ce pas? C’est la dernière et peut-être unique fois qu’il apparaitra dans le journal et on lui vole la vedette même un jour comme celui-ci. Je recherche son vrai nom et son si joli prénom féminin. Il est écrit tout petit sous le nom de son époux. Pauvre Jeanne Bastien. Elle a vécu sous un nom d’emprunt toute sa vie et sera morte avec celui-ci. On lui a volé sa propre mort.
Pourquoi vivre et mourir sous un nom qui n’est pas le sien? S’effacer et renoncer à sa propre et unique identité dès lors que l’on se marie?
C’est l’usage mais c’est injuste.

Le saviez vous

L’usage veut que femme mariée prenne le nom de son époux mais sachez que le mariage ne modifie pas le nom des époux et contrairement à ce qui est souvent affirmé, la femme ne change pas de nom par son mariage (d’ailleurs elle continue à être désignée dans les actes officiels pas son nom de jeune fille). Mais, en vertu d’une ancienne coutume, l’usage veut que de nombreuses femmes mariées portent le nom de leur mari, qui devient ainsi leur nom d’usage.
Ainsi, la femme mariée figure sur les documents administratifs sous le nom de Dupond suivi entre parenthèses du nom dont elle fait usage (épouse Martin)
. (Le Particulier Février 1994 n°86)

Voila, mon texte est terminé. J’espère que sa lecture ne vous aura pas ennuyé, peut-être amusé et vous amènera à réfléchir sur certains us de notre société.
Muriel Nauroy © le Soleil se lève à l'Est - 08/09/1996 - Ville de Talange - Nauroy-Rizzo - micro-Momentum