Quel est le coquin qui l'a réveillé ?
Quand le nombre d'or roupille, do not disturb him, merde.
Manquerait plus qu'on nous réveille aussi l'astrologue de service (celle qui éponge les libidos) ! Elle serait capable d'appeler sur son portable un volontaire désigné pour remplacer le tonton président qui s'est barré en duo avec un tourteau. Ne parlons pas de malheur mon café est déjà froid.
Passons aux choses sérieuses, dans "nombre d'or" il y a deux mots !
D'abord le nombre : s'il permet d'évaluer une pluralité d'êtres ou de choses, certains préfèrent s'en servir pour résoudre l'énigme du monde. Les tenants de l'explication de l'univers par des lois évidentes dont les nombres seraient la clé ont toujours prêté un sens magique à ceux, nombres premiers par exemple, dont les propriétés étaient différentes des autres. Du scientifique au scientiste puis au numérologue la distance n'est pas très grande.
Dénombrer enlève le mystère.
Ensuite l'or : l'or a toujours quelque chose à voir avec l'absolu. Qu'ils soient alchimistes, joailliers, banquiers ou paysans les hommes adorent l'idole or. Son couple formé avec l'argent (le premier est associé au yang alors que le second l'est au yin) augure mal de l'évolution du monde soumis aux lois triviales du marché. Mais c'est l'aspect parfait, relevant donc de l'inhumain qui fut choisi pour désigner le nombre. Il fallait donner à ce rapport une dimension géante. Ainsi il fut appelé "d'or" et même "divine proportion" et servit à construire des temples selon des lois forcément
transcendantales.
L'or rajoute le mystère.
Le nombre d'or symbolise la perfection mise en équation. Perfection qui pêche par son imperfection car phi est
irrationnel. Ainsi l'équation est belle, mais son résultat approximatif phi =
= 1,6180339... . Il entre ainsi dans le club très fermé des nombres magiques dont les résolutions posent toujours problèmes : pi=3,14159... et autres e=2,71828... .
Mais phi est en or et ses défauts sont rachetés et oubliés (le pardon n'est accordé qu'aux riches !). On touche l'absolu, la pureté, l'idéal, l'aboutissement de toute transmutation, la richesse ordinaire et les inégalités extraordinaires. Ce nombre est l'outil de celui qui cherche à mythifier le passer et à donner du monde une explication simpliste (comme si le beau obéissait à une règle aussi simple qu'un rapport en
extrême et moyenne raison) en utilisant la résolution géométrique d'une équation, résolution harmonieuse et séduisante. Mais il y a un hic, son irrationalité rappelle au crédule que toute harmonie cache un mystère et que l'explication n'est toujours qu'une approximation de la réalité.
Voila une bonne image du hiatus fondamental à l'origine de toute vie.
Ce nombre n'est d'or que par cette imperfection qui symboliquement est liée à une harmonie idéale.
Aujourd'hui le nombre d'or aurait comme unité le "dollars" qui n'a même plus besoin d'un vulgaire minerai jaune pour exister. Depuis les accords Bretton wood la conversion de la monnaie en métal n'est plus garantie. Le nombre a perdu l'or et son côté magique, il n'a conservé que le plus vulgaire des aspects, le côté pognon.
Notes
mythe Voir l’article de Marguerite Neveux, La Recherche, numéro spécial Nombres, N°278 Juillet/Août 1995
transcendentales Que la spirale de la coquille de l’escargot soit dessinée selon les propriétés du nombre d’or ajoute on le voit des éléments au mystère. Le vieux débat concernant l’existence d’une âme chez les gastéropodes s’en trouve enrichit.
irrationnel Nombre dont le développement décimal est infini et non périodique