L'avocat du diable : la sanction financière...
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L'avocat du diable : la sanction financière...

Première partie

Deux épisodes récents de la vie politiques nationales et les réactions qu'ils provoquèrent donnent à réfléchir sur la manière d'envisager les réformes fondamentales pour la survie de notre civilisation (tout de suite les grands mots !) et les leviers qui permettent d'en assurer l'application. Je veux parler d'une part de la taxe Tobin et du non-vote d'une résolution la concernant par le parlement européen et d'autre part de la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) et des controverses qu'elle suscite.

Il y a deux manières d'envisager ces taxes. Elles sont soit des sanctions, soit des prélèvements sur activité. La première a pour objectif de faire cesser quelque chose (amende), la seconde de partager le gâteau (impôts).

Le 22/01/2000 une résolution pour une étude sur la faisabilité de la taxe Tobin aurait pu être adopté au parlement européen. Il ne s'en est fallut que de 6 voix ! Si une majorité d'électeurs de gauche a bien voté la résolution, l'extrême gauche s'y est opposée pour la raison que cette taxe ne change pas le système capitaliste mais se contente de l'aménager. On se souvient que cette taxe inventée par le prix Nobel J Tobin avait connu une nouvelle jeunesse après que Ignacio Ramonet dans un éditorial étincelant ait proposé la création d'une ONG destiné à faire pression sur les états pour qu'ils l'appliquent. Le principe était suffisamment révolutionnaire pour déclencher les foudres des économistes libre-échangistes et autres éminences financières et suffisamment évident, de bon sens, logique pour séduire 60% des français. Le principe du « grain de sable » dans les rouages internationaux destiné « à stabiliser les marchés » avait son charme. Charme en grande partie du au sentiment d'impuissance dans lequel baignent les citoyens devant ce qui apparaît comme un système incompréhensible ou trop puissant pour être modifié.

On peut se demander quel est l'objectif de cette taxe. Taxe révolutionnaire dans sa définition même (impôt sur le marché des changes) puisque l'impôt premier, politiquement correct s'exerce sur le revenu du travail. La finance est, on ne sait pas pourquoi, hors compétition. Conceptuellement, c'est ce qu'elle apporte de nouveau en tentant de briser cette barrière ancrée dans l'esprit des « gens », ce n'est pas le moindre de ses apports ! Va t'elle pour autant arrêter le processus de circulation anarchique des capitaux ? Va t'elle réguler (et donc le consacrer en lui donnant une légitimité) ce système ? Va t'elle l'utiliser pour gagner de l'argent (pour qu'elle en rapporte beaucoup, la taxe Tobin devrait toucher le plus de transactions possibles ! En d'autres termes, plus l'argent des financiers générateurs de pauvreté circulent, plus il y « aurait » d'argent perçu pour aider les laisser pour compte du libéralisme) ? Autant de questions importantes qui mériteraient d'être approfondies !

Ainsi, on comprend la réticence de « l'extrême gauche » à consacrer un système en lui donnant le label « juste puisqu'imposé ». On connaît trop le cynisme de certains qui profiteront de cette contribution pour amplifier le système : je paie donc je peux !

Mais l'avocat du diable est un pragmatique, à l'heure du choix il préfère agir que se masturber les neurones et malgré ses doutes sur l'efficacité régulatrice de la taxe il se dit que l'argent prélevé est toujours bon à prendre, qu'il sera toujours mieux utilisé par une ONG que par des financiers. Il regrette ce vote négatif réellement réactionnaire !

Nicolas Woerner © le Soleil se lève à l'Est - 30/01/2000 - Ville de Talange - Nauroy-Rizzo - micro-Momentum