L'un : gros, grand, gris, avec de gigantesques oreilles (un peu comme celles d'echelon le discret et mythique système anglo-saxon d'écoute du monde entier et des alentours) et un nez qui traîne si loin par terre qu'il ressemble à ces renifleurs qui poursuivent sans vergogne les internautes dans leurs virtuelles pérégrinations, l'éléphant est un animal reconnaissable entre mille. Peu de danger de le confondre avec une libellule, un mérou ou un pitt bull car l'éléphant à ceci de singulier qu'il s'appelle Babar et qu'il aime le cirque (a-t-on jamais vu des lépidoptères, des mérous ou des chiens d'attaques sous un chapiteau, fut-il celui du soleil !!!). N'oublions pas que l'éléphant a un passé glorieux puisqu'on le vit jadis traverser les alpes avec Hannibal en cornac.
Aujourd'hui l'éléphant est l'ami de l'homme au point que ce dernier (qui n'est pas la moitié d'un con) le dépouille de ses défenses pour se tailler des coupe-papiers (à l'heure du courrier électronique c'est du dernier cri). Ce dernier (l'homme, toujours lui) aime à fréquenter la grosse bête pataude surtout dans sa version rose au sortir de soirées arrosées quand la maréchaussée brandit son ballon et que lui (l'homme, encore lui) déboit dans le fossé ce qu'il a ingurgité au bar. Dans l'éventail de ses qualités, n'oublions pas que l'éléphant s'envole parfois comme Jumbo, c'est dire l'étendu de ses capacités. Ainsi l'éléphant est l'animal moderne par excellence et nonobstant sa taille qui lui empêche d'emprunter le fils du téléphone aisément (on sait de source sûre qu'il reste parfois coincé dans les minuscules téléphones portables) il vit normalement et a rendez-vous avec sa belle éléphante le samedi soir en discothèque.
Babar a un rapport troublant avec l'internet par les symboles qu'il propose, taille des oreilles, longueur du nez et surtout à travers sa qualité la plus évidente : la mémoire.
L'autre : immense, enchevêtré, filandreux avec d'interminables ramifications, de longs câbles torsadés, des fibres optiques si grandes qu'on n'en voit pas le bout et surtout des millions de virus, si ce n'est des milliards, qui circulent sans que personne ne puisse intervenir, virus qui se baladent en toute liberté et infectent PC sur PC, c'est l'internet (dont la majuscule est tombé avec l'arrivée de l'argent roi et de sa monarchie absolue de droit dollars) construit par l'araignée. Internet (les règles de la ponctuation ont positionné la majuscule à l'insu de l'auteur) vient de loin, il vient du téléphone, du minitel, il vient de la poste et la pony-express, il est l'aboutissement d'une longue histoire des communications, du transport des informations et du désir d'aller toujours plus vite et plus loin sans se fatiguer les pieds. L'internet comme l'éléphant peut se voir en rose, il peut également s'envoler et quand l'internaute tombe sur l'insupportable message «404 not found» il a heureusement le temps d'aller pisser. L'internet va-t-il visiter discrètement le soir l'internet de l'autre sexe pour lui proposer la botte ? Rien n'est moins sûr, il faudrait déjà qu'il détermine son propre sexe, ou que les surfeurs le devinent à travers leurs expériences intimes !
L'araignée (mygale, ça vous rappelle quelque chose !) file son fil et l'internaute gigote sur la toile : belle relation SM qui voit un être normal omnivore, honnête, droitier, un mammifère bipède attiré par le parfum mystérieux des fibres tissées. Relation spéciale qui le voit rester coller au milieu de la toile, emberlificoté jusqu'au «coût» dans les innombrables ramifications hypermnésiques.