Lors des grandes pannes de courant il suffit, paraît-il, d'attendre neuf mois pour découvrir par quoi les téléspectateurs ont remplacé le film.
Des lectures à la lueur de bougies ? Ben non, évidemment !
Une sortie au théâtre (scène éclairée avec des chandelles comme autrefois) ? Il n'en est rien !
Des jeux de sociétés ? Encore moins !
Des contes à dormir debout ? Vous n'y êtes pas !
C'est plus simple que ça, l'homme et la femme se sont tout simplement mélangés !

Ainsi, donc, s'il y a moins d'enfants, si aujourd'hui on parle de dénatalité au 20h c'est à la télé elle même qu'il faut demander des comptes. Elle distrait les hommes de leurs activités naturellement normales.
c.q.f.d : la télécommande ithyphallique remplace l'érection véritable.

Une vie commence par du sexe. La télé qui prétend représenter la vraie vie n'échappe pas à la règle, le sexe c'est la zapette qui féconde la machine. La période de gestation du bébé n'est pas la même car on entre dans l'immédiat enfantement. La science via la génétique l'espérait, la télé le permet. Quoi ?
Choisir et façonner ses enfants. Le zapping c'est le génie génétique qui permet de triturer un monde de son choix au détriment de l'aléatoire conception par intromission des bambins dérappeurs. Métaphore, d'accord mais insatisfaisante pour l'amoureux d'amour (même les métaphores deviennent électroniques).

La problématique est donc la suivante :
Est-il possible de laisser parler ses hormones devant la télé ? Peut-on laisser fleurir les bourgeons malgré la télé ?
Bander quoi ! Manifester physiquement un émoi sexuel ! Sentir son sexe s'ériger ! Et pour ceux, étrangers au grand marché sexuel, naufragés du navire, pour ces gens qui persistent dans l'erreur non rentable et qui cherchent encore la fleur tendre et le "forget me not", pour eux seulement : éprouver du désir ou une émotion ! Le tout sans procuration ! Habituellement c'est simple, tu penses à Dominique et hop, t'as la trique ! (Une télé ailée passe !) Pourtant, les statistiques le prouvent, en face de l'écran cette fonction de l'organe n'a pas la même efficacité, on la dirait en préavis de grève.
Devant le tube cathodique, à tous les coups il y a un hic ! Non pas pour des raisons de confort, de canapé défoncé ou de digestion difficile, rien de tout cela, simplement bander devant sa télé est superflu ou pas naturel ! Je veux dire bander tout seul, les mains dans les poches. Le stimulus est fade, répétitif, vulgaire, bruyant, sans surprise et le regard est monopolisé par les lumières animées.

Mieux que débandante, la télé serait-elle abandante ? Ou plutôt : jingle voix off douce et sexy soyez sans inquiétude, la télé bande pour vous !
Lorsque malgré tout, excitation il y a, elle est à sens unique. Le compagnon de canapé (coéquipier des bons et mauvais moments) passe alors en pertes et pertes.
Le sexe dialogue est mort, vive le sexe soliloque avec le label de confiance fluo "vu à la télé" délicatement collé au bout de son bout. C'est plus commercial et bien meilleur pour l'audimat. Whoaou ! Que d'argent à gagner en perspective ! Avec les jeunes qui se tripotent de plus en plus tôt, les vieux qui même après la retraite (c'est un comble !) font guiliguili et la ménagère de 50 ans qui explore les subtilités de la bête à deux dos, il y a du fric à faire et des emplois à créer, plein d'emplois de proximités sur les trottoirs tristes de tous les tubes cathodiques. Le sexe est rentable, vive le sexe.
Ne soyons pas injuste, la pauvre télé déjà fortement vilipendée n'est pas seule dans cette galère. Les médias y sont tellement nombreux que même serrés comme des sardines à l'huile le Titanic ne suffirait pas à les transporter, tant et si bien qu'il serait plus simple de mettre les réfractaires sur l'arche du bon père Noé (plus efficace pour une politique des naissances que bien des spécialistes).

Quoi qu'il en soit : les spectateurs frustrés de miroir aux alouettes font des enfants !!! Alors qu'ils s'apprêtaient (déjà tout excités) à regarder "il était une fois dans l'ouest 18 redif" ou "Hélène et les garçons" ou encore un feuilleton dont l'eau est à peine rose, paf ! Panne d'électricité. Jamais à court d'idées originales et faute d'électrons le téléspectateur empoigne sans vergogne la solution de secours.
On appelle ça prendre sa vie en main. Les médias en font leurs gorges chaudes et confrontent longuement les avis de sexologues, sociologues, psychologues et autres Xlogues qui tous diagnostiquent un malaise ; Des colloques sont organisés qui constatent l'apparition d'un autre type de bambin, l'enfant par défaut cathodique. Son comportement est étudié par les éthologues de services. De quoi alimenter quelques bons reality-chauds.
Qu'Internet, le minitel et les médias électroniques tombent en panne de temps en temps et la profession de sage-femme non-virtuelle redeviendrait stratégique !

NOTES

Fernande, Georges Brassens
On voit par la qu'une démonstration rigoureuse rend des conclusions aussi irréfutables que l'éléphant de Vialatte